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Les entreprises n’ont sans doute jamais fait face à autant de défis. Des économies émergentes aux économies matures, les entreprises et le secteur commercial sont de plus en plus exposés à l’incertitude et à des risques politiques qui menacent leurs intérêts commerciaux.
Selon le rapport sur les risques mondiaux 2019 du Forum économique mondial, les tensions géopolitiques et géoéconomiques croissantes représentent actuellement les risques les plus importants à l’échelle mondiale. Établie selon les données de Fitch Solutions, la carte des risques politiques 2019 de Marsh souligne les changements par rapport à l’année dernière ainsi que les risques actuels, notamment les tensions qui se poursuivent entre les États-Unis et la Chine, les guerres commerciales, le Brexit et les changements au sein de la zone euro, l’avenir des programmes nucléaires de l’Iran et de la Corée du Nord, et les tensions entre la Russie et l’Ouest.
La transition vers un ordre mondial multipolaire davantage axé sur le protectionnisme devrait se poursuivre. Même si les États-Unis, la Chine, la Russie et, dans une moindre mesure, l’Union européenne (UE) et le Japon, demeureront les acteurs les plus puissants, les puissances émergentes comme l’Inde, l’Iran, l’Arabie saoudite, la Turquie et le Brésil joueront un rôle de plus en plus important.
Dans la région indo-pacifique, la concurrence géopolitique accrue entre les États-Unis et la Chine, qui intensifient leurs activités militaires dans la mer de Chine méridionale, pourrait entraîner des affrontements militaires imprévus. Entre-temps, les relations entre la Russie et l’Ouest demeureront tendues en 2019 en raison des accusations d’ingérence du Kremlin dans la politique nationale américaine et européenne, de l’empoisonnement des Skripal au Royaume-Uni, du complot de piratage d’un laboratoire en Suisse et des conflits se déroulant en Syrie et en Ukraine. Tous ces facteurs pourraient entraîner d’autres sanctions des États-Unis ou de l’UE à l’égard de la Russie. Par ailleurs, le retrait du président américain Donald Trump du Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire conclu entre l’URSS et les États-Unis en 1987 favorise également le déploiement de nouveaux missiles en Europe.
Comme l’indique Fitch Solutions, 2019 sera une année chargée sur le plan des élections pour les marchés émergents et certains états développés, ce qui pourrait renforcer le climat de volatilité politique. Nous les étudions plus en détail dans notre analyse régionale.
Incertitude à l’horizon
Les sentiments et pratiques isolationnistes et protectionnistes sont en hausse dans certains pays, ce qui ralentit, du moins pour l’instant, le processus de mondialisation. En effet, les actions dans une économie se répercutent sur les autres économies. Dans ce contexte, il pourrait s’avérer plus difficile pour les nations de réaliser des progrès collectifs en ce qui concerne les défis mondiaux.
En outre, le commerce international est de plus en plus affecté par l’incertitude; la principale cause actuelle étant probablement le conflit commercial entre les États-Unis et la Chine. En effet, les répercussions touchent inévitablement les économies axées sur l’exportation comme celle de l’Allemagne. Cette incertitude est renforcée par le Brexit, dont la nature et les effets demeurent inconnus. Parallèlement, une onde de peur se fait ressentir sur l’économie mondiale et, dans certains cas, on observe un recul des valeurs libérales et un changement vers une politique de droite.
L’incertitude économique peut toucher tant la sphère sociale que politique, et évoluer rapidement pour se répercuter sur tous les continents. Par exemple, l’interruption de chaînes d’approvisionnement ou les ralentissements économiques dans certains pays peuvent se faire ressentir bien au-delà des frontières. Plus que jamais, les risques politiques dans une partie ou une région du monde sont susceptibles d’avoir un impact sur d’autres régions, ce qui entraîne souvent des dommages inattendus.
Dans l’article ci-dessous, nous utilisons les données de Fitch Solutions pour examiner de nombreux risques politiques nationaux auxquels les entreprises pourront être confrontées en 2019. Le fait le plus notable actuellement est sans doute le nombre de menaces qui touchent globalement les économies soi-disant développées par rapport aux marchés émergents. Il sera donc essentiel de faire preuve de vigilance et d’effectuer des analyses globales des risques systémiques pour atténuer ces menaces.
Amérique du Nord
La prise de contrôle de la Chambre des représentants par les démocrates lors des élections de mi-mandat de 2018 devrait accentuer l’opposition au sein du paysage politique américain en 2019. Les États-Unis ont d’ailleurs connu le plus long arrêt administratif gouvernemental de leur histoire. Une Chambre plus militante pourrait entamer des enquêtes sur les actes répréhensibles présumés commis par le président Trump ou d’autres personnes. Des candidats sont déjà annoncés en vue des élections présidentielles du Parti démocrate de 2020. Et alors que le Congrès divisé devrait conserver ses politiques d’élaboration et d’adoption de mesures législatives, le président américain devrait se concentrer sur la politique étrangère, qui offre au pouvoir exécutif une latitude plus grande que la politique nationale.
En 2019, les tarifs commerciaux et les différends géopolitiques avec la Chine pourraient s’accentuer, ce qui entraînerait d’autres représailles de la Chine et des ripostes des États-Unis. En outre, les nouvelles sanctions contre l’Iran proposées par Trump en novembre 2018 risquent de compliquer les relations avec Téhéran et d’augmenter potentiellement le risque de conflit, ou d’entraîner de nouveaux efforts de rapprochement.
Les États-Unis devront également veiller au bon déroulement des mesures de rapprochement avec la Corée du Nord. Entre-temps, à Washington, les enquêtes en cours sur les liens présumés entre le président Trump et Moscou pourraient empêcher celui-ci de mettre en place des initiatives susceptibles d’améliorer les relations bilatérales avec la Russie, comme l’a indiqué Fitch Solutions.
Europe


En 2019 et pour les années suivantes, la politique au Royaume-Uni demeurera axée sur les négociations liées au Brexit et à la période subséquente pendant laquelle le Royaume-Uni se retirera de l’UE. Sur un autre plan, l’UE traversera une période de transition en 2019, alors qu’elle se préparera aux élections parlementaires, en mai, ainsi qu’à l’entrée en fonction des nouveaux présidents de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne, et du Conseil européen, respectivement en novembre et en décembre.
En Allemagne, la chancelière Angela Merkel pourrait se retirer de la présidence avant la fin de son mandat, soit sans attendre les élections générales prévues à l’automne 2021, ce qui signifierait qu’il n’y aurait plus de dirigeant à la tête de l’UE. Bien qu’il puisse tenter de combler le vide, le président de la France Emmanuel Macron pourrait devoir se concentrer sur les questions politiques nationales en raison d’une baisse de popularité auprès de la population française.
Pendant ce temps, le conflit en Ukraine pourrait s’aggraver, particulièrement si le président Petro Poroshenko ou son successeur cherche à renforcer le nationalisme au cours de l’année électorale, et en cas de riposte de la Russie. En Moldavie, les élections générales qui se tiendront en février 2019 pourraient transformer le pays en un autre point de mire; le gouvernement pro-occidental se dressant contre l’opposition prorusse.
En Espagne, le gouvernement du Parti populaire dirigé par le premier ministre Mariano Rajoy, qui s’est effondré en juin, a été remplacé par une administration socialiste minoritaire recevant un appui peu généreux du Parlement. En ce qui concerne la Catalogne, l’instabilité se poursuit. Par conséquent, Fitch Solutions a réduit la cote d’indice de risque politique à court terme (STPRI) de l’Espagne, de 68,3 (2018) à 64,6 (2019), ce qui représente la plus grande baisse pour le continent. Une cote STPRI en baisse représente une stabilité affaiblie et n’est qu’un élément de l’indice global de risques politiques accordé par Fitch Solutions.
Afrique

Selon Fitch Solutions, le continent africain, encore une fois, a connu certaines améliorations importantes sur le plan des risques politiques, mais également des détériorations notables. Les cotes STPRI en Afrique du Sud, au Mozambique et au Soudan du Sud se sont tous améliorées. En Afrique du Sud, la démission du président Jacob Zuma et son remplacement par le président proréforme Cyril Ramaphosa en février 2018 ont mis fin à une période de manifestations publiques importantes. Le Mozambique a progressé vers un accord de paix entre le FRELIMO, le parti au pouvoir, et la Renamo, un parti de résistance, tandis qu’au Soudan du Sud, un accord de paix a été signé entre le président Salva Kiir Mayardit et le chef rebelle Riek Machar.
Fitch Solutions a considérablement diminué ses cotes STPRI en Zambie, au Mali, en Algérie, en Tunisie, au Cameroun et en République centrafricaine. La Zambie a quant à elle connu des tensions sociales accrues en raison des conditions économiques qui se sont rapidement détériorées et des inquiétudes de la population à l’égard de l’augmentation des niveaux de dette, tandis que les groupes d’opposition cherchent à destituer le président Edgar Lungu. Au Mali, les élections présidentielles du mois d’août ont entraîné des tensions sociales accrues ainsi que des conflits ethniques persistants et des insurrections dans le centre et au nord du pays. En Algérie, l’incertitude s’accentue quant aux élections présidentielles de 2019.
Quant à la Tunisie, l’effondrement de la coalition entre le parti Nidaa Tounes dirigé par le président Beji Caid Essebsi et le parti Ennahda compliquera les négociations politiques à l’approche des élections parlementaires et présidentielles prévues à la fin de 2019. Au Cameroun, il y a eu un certain mécontentement au cours de la réélection du président Paul Biya en octobre 2018 et du report des élections municipales et législatives prévues en 2019. En République centrafricaine, l’environnement humanitaire s’est détérioré davantage alors que la lutte au pouvoir entre les groupes armés se poursuit, ce qui augmente les risques d’un retour possible à des violences à grande échelle entre les musulmans et les chrétiens.
Amérique latine

Les données de Fitch Solutions indiquent que l’indice des risques politiques de plusieurs pays d’Amérique latine s’est amélioré. Les cotes du Guatemala, du Chili et du Paraguay ont d’ailleurs connu les plus fortes hausses. La cote du Guatemala s’est améliorée après que le président Jimmy Morales ait bénéficié d’un soutien du Congrès et de l’établissement plus important qu’en 2017, tout en évitant des manifestations de grande ampleur. Au Chili, l’élection du président Sebastian Pinera en décembre 2017 a mis fin à une période d’incertitude en entraînant une reprise économique et une baisse du chômage. Pendant ce temps, le Paraguay connaît une plus grande transparence politique ainsi qu’une diminution des tensions sociales depuis l’élection du président Mario Abdo Benitez en avril. Fitch Solutions a toutefois considérablement réduit la cote du Nicaragua en raison des importantes manifestations contre la présidence de Daniel Ortega en 2018. La situation sur le terrain pourrait demeurer instable dans un avenir proche. Enfin, l’inflation au Venezuela devrait s’élever à 10 000 000 % en 2019, en raison du nouveau contexte politique – Juan Guaidó, président du Parlement, étant considéré par de nombreux pays comme le président par intérim – qui augmente l’incertitude quant à l’avenir du pays.
Moyen-Orient
Bien que l’équilibre entre les pouvoirs en Syrie ait penché en faveur du président Bashar al-Assad, un accord de paix semble peu probable dans un avenir immédiat. Le conflit risque d’entraîner un affrontement entre les armées russes et américaines. Tout affrontement impliquant des troupes « officielles » serait d’ailleurs dangereux et pourrait provoquer une crise majeure. L’Iran traverse une période particulièrement difficile alors que l’année 2019 marquera le 40e anniversaire de la révolution iranienne en février. Son économie se détériore également en raison du retrait de l’administration Trump du Plan d’action global conjoint (JCPOA ou l’Accord de Vienne sur le nucléaire iranien) en mai 2018, et de la réimposition ultérieure des sanctions américaines. Les États-Unis pourraient également resserrer la pression sur l’Iran en 2019, ce qui pourrait entraîner une confrontation militaire qui s’avérerait catastrophique pour l’économie mondiale advenant des perturbations liées à l’approvisionnement en pétrole.
Asie-Pacifique
Les tensions frontalières entre la Corée du Nord et la Corée du Sud devraient diminuer. Comme l’a indiqué Fitch Solutions, les deux pays acceptent d’établir des zones d’exclusion aérienne et de cesser d’effectuer des exercices militaires le long de leur frontière. Ces négociations comportent toutefois un risque important et pourraient freiner le rapprochement entre les États-Unis et la Corée du Nord. Les trois pays prévoient de participer à d’autres sommets en 2019, mais on ignore si des progrès tangibles peuvent être réalisés.
Pendant ce temps, en Chine, le président Xi Jinping a aboli la limite des mandats présidentiels en 2018 et renforcé son pouvoir, ce qui augure bien pour les réformes économiques structurelles au cours des années à venir. Ces événements compromettront toutefois la stabilité politique à long terme en réduisant les contrôles auxquels est soumis le parti au pouvoir et en attribuant à un seul décideur la majorité des pouvoirs politiques. Les relations qui se détériorent avec les États-Unis sur le plan du commerce, des tarifs, des droits de la personne et des technologies demeurent le principal défi de la Chine. Parmi les autres risques, notons le ralentissement de la croissance économique en Chine (moins de 6 %), et les tensions croissantes entre celle-ci et d’autres états asiatiques au sujet de litiges territoriaux en mer de Chine méridionale et orientale.
Recommandations en matière de gestion des risques et d’assurance
Il est essentiel que les entreprises reconnaissent et évaluent l’impact potentiel des divers risques politiques auxquels elles font face, ainsi que la nature systémique de ces risques et les éventuelles répercussions qui se produisent souvent bien au-delà de leur pays ou de leur secteur. Il est également important de tenir compte du caractère géographiquement diffus de bon nombre des risques politiques, notamment à la lumière de l’accroissement récent de l’exposition des pays du G7 et d’autres économies matures, situation qui a sans doute contribué à empirer la perception de tels risques.
Les risques politiques sont généralement difficiles à prévoir. Cependant, les entreprises peuvent analyser et modéliser les risques en quantifiant clairement leurs activités et leurs sources de pression. L’attitude des entreprises quant aux risques politiques est également importante. Elles doivent éviter d’évaluer les risques politiques de façon isolée ou sur une période trop courte.
En se dotant d’une assurance contre les risques politiques, les entreprises peuvent se protéger contre cette volatilité. Il n’est habituellement pas possible de contrôler directement les risques politiques. Toutefois, ceux-ci peuvent être atténués grâce à une assurance contre l’insolvabilité et les risques politiques afin d’offrir une confiance accrue par rapport aux avantages de l’occasion.
Le marché des assurances contre les risques politiques est en croissance. Les assureurs comptent des équipes d’analyse plus solides et disposent d’un plus grand nombre de données. L’étendue des risques potentiellement catastrophiques a toutefois augmenté, tout comme la perception de ce que constitue un risque a empiré. Du point de vue des assureurs, ceux-ci tiendront généralement davantage compte des personnes qu’ils assureront ainsi que de ce qui sera couvert par la garantie.
Le secteur d’activité de l’entreprise, son appétit pour le risque et son historique dans les pays où elle mène des activités, ainsi que sa contribution financière et sociale à ceux-ci, sont souvent des facteurs déterminants du type de polices qu’elle pourra obtenir.
Historiquement, les multinationales ont souscrit des assurances contre la violence politique ou le terrorisme, car les taux étaient généralement inférieurs à ceux de l’assurance contre les risques politiques, mais également parce que la couverture des dommages physiques est étroitement alignée sur l’assurance des biens. Toutefois, cette stratégie peut entraîner des écarts importants. L’assurance contre les risques politiques peut contribuer à combler les lacunes, car elle comprend une garantie contre ces deux risques. Mais plus important encore, en l’absence de dommage physique, elle couvre également la perte d’un investissement ou d’un contrat causée par une action ou l’inaction gouvernementale.
Les contrats d’approvisionnement de biens et de prestations de services conclus avec le gouvernement ou des entités privées dans les pays émergents comportent toujours une exposition implicite à certains risques politiques ou économiques sous-jacents. Dans un contexte de protectionnisme mondial accru, la restriction de paiements en devise forte pour des sociétés à l’étranger ainsi que l’imposition de sanctions et d’embargos commerciaux sont des problèmes récurrents dans les pays où les gouvernements tentent de faire respecter les objectifs de politique étrangère, d’influencer l’opinion publique à l’intérieur du pays ou de gérer des problèmes économiques. De plus, les entreprises peuvent se retrouver face à des contraintes qui limitent les contreparties internes et qui les empêchent d’offrir une concurrence efficace sur les marchés cibles. Les contrats peuvent être couverts pour des périodes de trois à sept ans ou, si la partie acheteuse a le statut de souverain, jusqu’à 20 ans.
L’assurance n’est pas une mesure de protection contre tous les risques, mais elle peut permettre à une entreprise de réduire l’incertitude et la volatilité liées à un contrat ou à un investissement majeur afin de protéger les intérêts des actionnaires.
À PROPOS DE CE RAPPORT
La carte des risques politiques 2019 de Marsh s’appuie sur les données et les renseignements de Fitch Solutions, source importante d’analyse indépendante des risques politiques, macroéconomiques, financiers et industriels. Cet outil présente une vision globale des problèmes auxquels font face les sociétés multinationales et les investisseurs. Cette carte attribue une cote par pays selon la stabilité politique et économique, indiquant les lieux où les risques sont les plus probables ainsi que les problèmes à considérer pour chaque pays.
Selon la méthode de Fitch Solutions, la cote d’un pays est basée sur 100 : plus l’indice est élevé, plus le risque politique est faible. Ce rapport prend en considération les changements d’indice de risque politique à court terme (STPRI). Il s’agit d’une mesure qui prend en compte la capacité d’un gouvernement de proposer et de mettre en œuvre des politiques, la stabilité sociale, les menaces immédiates à la capacité du gouvernement de diriger, les risques d’un coup d’État et plus encore.